Faisait partie du diocèse de Senez et de la viguerie du Val de Barrême, aujourd’hui dans le canton de Barrême. Le territoire actuel couvre 3748 hectares et est situé au sud de Digne en direction de Barrême. Il occupe une zone de moyenne montagne aux reliefs très accentués. Une partie côtoie les rives de l’Asse et était traversé par l’ancienne voie impériale Nice-Digne qui recouvre le tracé de la Via Ventiana ou Salinaria. De nombreux sites antiques ont été repérés ainsi qu’une occupation protohistorique (CAG n° 055, p. 139-141). La commune est formée de la réunion de trois anciennes communautés, Chaudon, Norante rattachée à la fin du XVe siècle et Bédejun ou la Clappe en 1908. Cette dernière communauté ne relevait pas du diocèse de Senez mais de celui de Digne.

CHAUDON

Le village, situé dans la montagne à plus de 1000 mètres d’altitude, était traversé par l’ancienne voie impériale. La première mention remonte au tout début du XIIe siècle puis au XIIIe siècle avec le castrum de Chaudone (1). Une église desservant Chaudon et le Plan-de-Chaude est mentionnée vers 1300, ecclesia de Chaudono et de Plano Chaudoni. Elle est encore citée en 1376 (Pouillés, p. 289 et 292). Abbayes et Prieurés nous apprennent que le prieuré Notre-Dame du Plan est uni au Chapitre de Senez, mais sans fournir aucune date (p. 195). Cette église Notre-Dame est à côté du cimetière, selon la visite de l’évêque de Digne en 1683 (2). En 1697, c’est au tour de l’évêque de Senez, Mgr Soanen, de visiter la paroisse et il demande qu’il sera mis une autre pierre d’autel en la chapelle du cimetière de Chaudon qui estoit anciennement l’église paroissiale ayant interdit icelle qui y est pour n’estre pas suivant la disposition des saints canons. Il fait remarquer également que la chapelle de Norante est une succursale de Chaudon. Tant que la grande route passait par Chaudon, le village fut plus important que celui de Norante. Quand ce passage fut abandonné au profit de la N 85 créée au XIXe siècle dans la vallée, Norante pris le pas sur Chaudon. L’église paroissiale, sous le titre de Notre-Dame du Plan est donc abandonnée lors de la visite de 1683 et va continuer à se dégrader jusqu’à disparaître totalement. Seul le cimetière va continuer sa fonction qui semble avoir commencé très tôt puisqu’on y a découvert des tombes sous tegulae en 1984 (CAG, n° 055, p. 139).

114. Les chapelles Saint-Christophe et Saint-Sébastien

Si la paroisse a comme titulaire Notre Dame, elle a deux patrons, Christophe et Sébastien, qui possèdent chacun leur chapelle. L’abbé Féraud rappelle ces deux fêtes patronales du 20 janvier et du 25 juillet qui se célèbrent avec bravade et attirent beaucoup d’étrangers (p. 98). Celle qui est la plus proche du village, Saint-Christophe, va devenir l’église paroissiale après l’abandon de la première. Elle apparaît sous le titre de Saint-Christophe lors des visites pastorales du XIXe siècle, mais a repris la titulature de la primitive église. On ne sait quand elle tombe en ruine. Il en reste quelques éléments signalés par la carte IGN comme église ruinée.

La chapelle Saint-Sébastien est le seul édifice religieux qui subsiste actuellement et a donc pris le relais comme paroissiale des deux premières. Elle est signalée lors des visites pastorales du XIXe siècle, entre 1857 et 1894 comme étant en bon état.


NORANTE

Le village aujourd’hui fait figure de gros bourg à côté de celui de Chaudon. Il apparaît dès le début du XIIe siècle lors d’une donation faite au monastère d’Estoublon par Rostang, fils de Rainard : ce bien se trouve dans le comté de Senez, dans le domaine vulgairement appelé Norante, qui se situe juste à côté du château nommé Chaudon au diocèse de SenezLes limites et confronts de cette terre sont, à l’orient, le territoire de Barrême, et elle est distincte du château appelé Apellario ; et cette donation, de la terre qui se nomme Aurans, Isenguer, Rovored (3). Cette donation ne peut être antérieure à octobre 1011, date où fut fondé le monastère d’Estoublon. La Gallia Christiana de Fisquet (Senez, p. 200) ajoute qu’en 1027 Pierre Ier, évêque de Senez, fait don au monastère d’Estoublon des églises de Saint-Théofred de Norante et de Saint-André d’Aurent. L’abbé Féraud dans ses Souvenirs Religieux reprend les mêmes données. On retrouve le lieu-dit Aurans avec une église dédiée à saint André. La carte de Cassini l’écrit Dorante, le Bas et le Haut, orthographe rétablie par les cartes modernes en Bas Auran et Haut Auran. Ces lieux-dits se trouvent en rive gauche de l’Asse (750 et 990 m d’altitude), mais il ne reste aucun témoin de l’église Saint-André. Quant à l’église Saint-Théofred de Norante, il est probable qu’elle était construite hors du village, étant antérieure à l’enchâtellement. Il faudrait peut-être la placer à l’emplacement du cimetière actuel. Le titulaire de l’église paroissiale est saint Antoine ermite, mais on ne sait depuis quand.

115. La chapelle Sainte-Madeleine

Elle figure sur la carte de Cassini (n° 153) à la hauteur du village de Norante, entre la route et l’Asse, Ste Magdelaine. L’abbé Féraud (p. 99) révèle que Madeleine est la patronne de la paroisse. La chapelle est citée par les visites pastorales de 1857 à 1894, toujours en bon état. L’enquête sur les lieux de culte de 1899 indique la date de 1840 pour sa construction et qu’on y vient en procession les jours de l’Ascension et de sainte Madeleine. La date de 1840 est sans doute une rénovation puisqu’elle figure sur Cassini. Par la suite, plus aucune citation, elle semble avoir complètement disparu, rien ne la signalant sur les cartes modernes.

BEDEJUN

Aujourd’hui La Clappe, le hameau est situé au nord de Chaudon, après avoir passé le Col de Corobin. Il était également placé sur l’ancienne voie impériale et dans le diocèse de Digne avant la Révolution. Il est dit castrum de Bec de Ju par l’enquête de 1252 (n° 521, p. 351) et l’église avec ses dîmes et dépendances appartient au chapitre de Digne (confirmation de 1180) (5). L’abbé Féraud nous apprend que l’église paroissiale a pour fête titulaire et patronale la Nativité de la Vierge (8 septembre). Elle date de 1606 (p. 102). La carte de Cassini indique deux lieux différents, la Clape comme hameau avec une église et plus au nord Bedejuan avec une ruine entre La Clape et Dourbettes. Il faut sans doute comprendre qu’il y eut un regroupement de la population à la Clappe et que Bédejun fut abandonné. En tout cas, c’est à cet endroit qu’il faut situer le castrum et l’église cités à la fin du Moyen Age et non à La Clappe. Aucune chapelle rurale n’est signalée sur la paroisse.

Synthèse

A Chaudon, la chapelle du cimetière est qualifiée d’ancienne paroisse et on y a découvert des tombes sous tegulae. A Norante, il semble que l’église Saint-Théofred soit également antérieure au castrum et pourrait, elle aussi, se trouver dans le cimetière.


(1) Bouche, p. 278. Ch. Rostaing attribue la citation de 1045 du CSV n° 776, p. 112 à Chaudon, unum mansum in Caldone. Guérard place ce caldo à la Palud-sur-Verdon, ce qui est plus vraisemblable, les divers biens recensés dans cette charte sont tous situés aux alentours proches de Castellane. Pour la citation du début du XIe siècle, voir le paragraphe sur Norante.

(2) Proche de l’évêché de Digne, puisque Bédejun, alias La Clappe, en faisait partie, l’évêque de Digne s’est permis de visiter la paroisse de Chaudon bien qu’étant dans le diocèse de Senez (Visite du 22 juin 1683, ADAHP 1 G 5, f° 58 r°-59 v°).

(3) Chartes du XIe siècle, dans Catalogue des chartes antérieures au XIe siècle (687-1112), par A. Villard et E. Baratier, Arch. des B-d-R, Marseille, 1998, p. 51, n° 54.

(4) P. 51 : Pierre, évêque de Senez fit don au monastère d’Estoublon, en l’an 1027, des églises de Saint-Théofred de Norante et de Saint-André d’Aurens à condition qu’elles seraient desservies par des moines. Augier, évêque de Riez, confirma à son tour la même fondation, en l’an 1096, et l’augmenta par de nouvelles concessions.

(5) Isnard, p. 136 et 305-306.

  • À propos de l'auteur : Daniel Thiery