Faisait partie du diocèse et de la viguerie de Digne. Aujourd’hui dans le canton de La Javie. Situé en Haute-Bléone, le territoire s’étend sur 4568 hectares et est composé de gorges étroites et de vallons encaissés. L’habitat est dispersé en plusieurs hameaux et bastides. L’abbaye de Saint-Victor est bien implantée en 814 avec deux colonges à Buxeto (la Bouisse Haute et Basse), deux colonges et une bergerie à Primo Capa (Champ Premier), deux colonges à Sebeto (La Sébière), une colonge et une bergerie à Olegolis (Auche) (1) . Jusqu’au XVIIe siècle, il existe trois communautés avec chacune leur église, au Clucheret, à Saint-Pierre des Auches et à Beaujeu même.
49. Sainte-Marie du Clucheret
Au Clucheret, Saint-Appolinaire ou Sainte-Marie, est un prieuré desservi par Saint-Victor. La confirmation en est donnée le 4 septembre 1079 par le pape Grégoire VII, cellam sancti Apollinaris ad Clocher. Puis l’ecclesia Sancte Marie de Clochario est citée en 1206 et 1218, avec un prieur en 1227 et 1236 (2). C’est toujours un prieur qui dessert l’église en 1351 et 1376 (Pouillés, p. 256 et 259). Le prieuré et la paroisse dépendent de La Javie où siège le prieur de Saint-Victor, représentant de l’abbaye en Haute-Bléone. Lors de la visite de l’évêque en 1683 il est dit que Messire de Lisle, religieux de l’abbaye de Saint Victor, prieur de Chaudol et de La Javie, perçoit la moitié de la dîme, le curé l’autre (ADAHP 1 G 5). Au XVIIe siècle l’église du Clucheret deviendra une simple succursale. Son statut de paroisse l’a autorisé à posséder une cuve baptismale et un cimetière. Elle est toujours en bon état avec au-dessus de la façade un clocheton à deux arcades, mais avec une seule cloche.
49 bis. Chapelle Saint-Joseph de Sériège
Elle est signalée par Cassini et les registres paroissiaux du XVIIIe siècle. Le 25 juin 1724, est célébré un mariage dans la chapelle St Joseph de la Seriage dépendante de Beaujeu entre Pol Martin de Mariaud et Anne Bonnet de la Seriage (BMS Beaujeu, 1610-1692, vue 297). Disparue.
50. Le prieuré Saint-Pierre des Auches, ancienne paroisse, sur un site antique
Quand on quitte le village de Beaujeu en remontant la rivière de l’Arigeol par la D 757 on parvient au hameau de Saint-Pierre où se dresse une église dédiée à saint Pierre. L’abbé Féraud raconte : cette Paroisse à 180 âmes de population, et se compose du village de Saint-Pierre, du hameau de Cerieige, et de sept maisons de campagne. Cette paroisse est placée dans une vallée, au Midi, et au pied d’un coteau. Il y a 60 ans seulement qu’elle a été érigée en succursale. Il n’y avait alors qu’une petite chapelle dédiée à saint Barthélemy, que l’on a agrandie en 1840, sous le titre de saint Pierre, patron du lieu (p. 87-88).
Quand Mgr de Boulogne, en 1603, descend de Mariaud pour sa visite pastorale, il arrive au masage de St Pierre ou arrivés, serions entrés dans l’église du dit lieu…. Il nous a été dit que la ditte église étoit fondée sous le titre de St Pierre d’Ochiis…. On nous a dit aussi qu’audit masage de St Pierre et au dessus du village y a une église toute ruinée et qu’on dit avoir été l’église paroissiale et y avait cimetière, laquelle n’avons visité (3). Dans les réquisitions finales, il est relaté que les dessus nommés du masage dud St Pierre ont remontrés qu’attendu qu’au dit masage y a une église disrupte, qu’on dit être l’église paroissiale dud lieu, y ayant cimetière, de laquelle le prioré porte le titre, requièrent que le dit prieur ait à faire rebatir à ses dépens, dire ou faire dire messe un dimanche autre non, et tous les lundis une autre messe pour les trépassés comme a été ordonné ainsi qu’ils ont ouï dire par Messire de Croix (4) eu égard qu’au masage y a plusieurs habitans. L’abbé Féraud est le seul à rappeler que l’on trouve, au Nord de la paroisse et sur une hauteur, des vestiges de construction que l’on croit être un ancien monastère. La tradition porte que ce monastère était une succursale de la maison des Templiers de Valence (Drôme). Ce qui est certain, c’est qu’il existait, en ce lieu, il y a cinquante ans, une chapelle dédiée à saint Pierre, où les habitants se rendaient en procession le jour de la fête de cet apôtre (p. 87-88).
Un Raimundus prior sancti Petri de Jochis est cité comme témoin en 1206 et une ecclesia de Ouchis en 1218 (CSV II, n° 986, p. 438 et n° 988, p. 440). Cette église Saint-Pierre dépend, comme celle de Beaujeu, des Augustins de Saint-Ruf de Valence. Un cahier relié de 67 folios écrits recto-verso, composé par le curé Fabre de Beaujeu le 8 novembre 1883, réunissant des textes transcrits par deux prieurs de Beaujeu, Jean de Maubousquet prieur jusqu’en 1756, continué par son successeur, Jacques de Rochas, rappelle les biens et actes de 1366 à 1757 des Augustins de Saint-Ruf de Valence. Titre donné par Fabre : liber memorialis rerum antiquarum prioralis de Bellojoco (H 4). Le premier texte est publié à Rome le 3 septembre 1488 et rappelle les privilèges accordés par les papes à l’abbaye de Saint-Ruf. Sont nommés neuf papes depuis Urbain II (1088-1099) jusqu’à Alexandre IV (1254-1261). Puis sont dénombrées toutes les possessions de l’Ordre, parmi lesquelles l’ecclesiam sancti Petri de Ochiis cum pertinentiis suis, ecclesiam sancta Maria de Bello Joco cum capellas et aliis pertinentiis suis, eccelesiam sancti Mauritii de Tramo cum pertinentiis suis, ecclesiam de Marialdo cum pertinentiis suis.
500 mètres au nord du hameau de Saint-Pierre figure un quartier portant le nom de Prieuré où s’élève une habitation. Une petite colline la domine à l’ouest. Le haut de la colline a été aménagé pour en faire une surface plane. On remarque même des terres-plains construits au bord des pentes pour en augmenter la surface. Cette surface plane est entièrement entourée de murs éboulés de gros blocs formant une grande enceinte rectangulaire couvrant quelques 1600 m². Aujourd’hui elle est presque entièrement boisée, dans les murs et à l’intérieur se remarquent des fragments de tegulae ainsi que des pierres de taille. Un petit mamelon au sud présente en surface les traces d’infrastructures pouvant correspondre au site de l’église et du cimetière.
51. La Transfiguration de Boulard
Boulard est un hameau situé au NO de Beaujeu qui est habité par six familles en 1775 lors de l’affouagement (C 25). L’abbé Féraud donne quelques renseignements supplémentaires : la paroisse de Boulard, placée entre deux montagnes, sur une petite colline exposée au Midi, se compose du village, des hameaux de Sausée, de Bouse et des Péaugiers. Population totale : 100 âmes. Il y a une école pendant l’hiver seulement. L’église de Boulard, bâtie en 1824, est sous le titre de Saint-Sauveur ou de la Transfiguration (p. 88). La date de construction donnée par Féraud est une restauration car l’église est citée par Mgr le Tellier le 19 mai 1683 : les habitans du hameau de Boulart nous ont demandé de bien vouloir leur confirmer dans leur ancienne permission touchant le service de leur chapelle, attandu de la grande distance qu’il y a de leur hameau à la paroisse (1 G 5). Lors d’une visite pastorale en 1857, il est dit que les murs de l’église ont été construits à neuf en 1804 et que le cimetière en bon état avec une croix fort ancienne. En 1872, il est rapporté qu’on a réparé l’intérieur et l’extérieur de l’église ainsi que la toiture. En 1882, l’église est en assez bon état avec deux cloches, dans le campanile, dont une neuve achetée en 1882 (2 V 88,93 et 94). Lors de l’inventaire de 1906, le curé proteste et dit que l’église a été bâtie en 1772 et meublée par les habitants (1 V 66). Il doit s’agir d’une restauration.
52. Chapelle Sainte-Anne de Fontfrède
Fontfrède est un hameau situé au nord de Beaujeu et est composé de trois familles et de quelques bastides en 1775. Une chapelle est citée lors des visites pastorales du XIXe siècle sous le titre de Sainte-Anne, non pas dans le hameau, mais à l’écart et isolée. Elle n’est pas citée auparavant et n’a jamais constitué une paroisse. Elle est qualifée en 1857 de chapelle rurale au quartier de Fontfrède. Elle est en bon état en 1865 et en 1871 elle est à réparer. C’est en 1884 que l’on apprend qu’elle est sous le titre de sainte Anne. Elle figure encore sur les cartes actuelles. La carte de Cassini l’associe au Logis Neuf au bord de la route reliant Digne à Seyne comme nommée par le cadastre de 1829 qui figure également la chapelle et le le Logis. Halte pour les voyageurs, le Logis les préparait à la rude montée du Col du Labouret, 200 mètres de dénivelé, et la chapelle apportait une garantie supplémentaire d’un bon voyage.
Synthèse
Il semblerait, au vu des indices concernant Saint-Pierre des Auches, que nous soyons sur un site aménagé pendant la protohistoire avec une enceinte en gros blocs, romanisée par la suite, réoccupée à l’époque carolingienne avec peut-être déjà une première église aux mains de Saint-Victor. Enfin, lors du renouveau des monastères au XIe siècle, l’ensemble tombe dans les mains des Augustins qui en font une paroisse à part entière. Abandonnée progressivement, l’église et le cimetière vont être remplacés par une nouvelle église construite dans le hameau de Saint-Pierre, mais les paroissiens continueront de monter en procession vers la première église le jour de saint Pierre, pratique qui semble avoir été abandonnée au début du XIXe siècle.
(1) CSV, II, H 2, 21, 22, 40, 43, 59, 60, 61, 62.
(2) 1079, n° 742 ; 1206, n° 986 ; 1248, n° 988 ; 1227, n° 987 et 1236, n° 989.
(3) ADAHP H 4
(4) Conrad de la Croix, évêque de Digne de 1466 à 1479.