Faisait partie du diocèse d’Aix et de la viguerie de Forcalquier, aujourd’hui dans le canton de Reillanne. Cette petite commune de 959 hectares est située à l’est de Reillanne à une altitude moyenne de 500 mètres. Elle est traversée par la rivière le Largue. Le climat est tempéré ; le sol de la Plaine est très fertile et les eaux abondantes y favorisent la verdure des prairies (Achard III, p. 98). Le territoire était traversé par la via Domitia passant à la chapelle Notre-Dame-du-Pont. C’est ce que suggère Achard : le chemin « Seynié » qui conduit d’Ardenne à Ceyreste passe pour être une Voie militaire des Romains. La population a atteint les 350 habitants en 1315 pour n’en conserver que 80 en 1471. Par la suite, elle parviendra à 286 en 1851 (Atlas, p. 207).
Le castrum de Villamuris est cité au début du XIIIe siècle (Bouche I, p. 218), mais le nom apparaît auparavant, aux alentours de 1025, in castro quod dicitur Villa Murs (CSV I, n° 418, p. 424). Ce n’est qu’en 1118 que l’on apprend que l’ecclesia de Villamuris fait partie des possessions de l’abbaye de Montmajour (GCN I, Inst, col. 9). Elle l’est encore du temps d’Achard : le curé a le titre de Prieur décimateur. Il est à la collation des Bénédictins de Montmajour. L’église paroissiale est sous le titre de saint Etienne et a comme patron saint Trophime. Pour R. Collier, cette église possède des traces de structure médiévale – appareil, moulures, claveaux – et a dû faire l’objet de maintes reprises. Sa nef, sans travées, est voûtée en berceau, peut-être surbaissé, avec une moulure seulement à droite ; l’abside, en cul-de-four, offre une moulure, mais sans doute en plâtre, comme la précédente. Une double arcade en plein cintre, retombant sur une pile rectangulaire, fait communiquer la nef avec un bas-côté moins long qu’elle et voûté d’arêtes. Des impostes formées par un méplat et un quart-de-rond existent à la naissance des arcades. Un clocher, assez monumental, à trois baies en bel appareil, couronne l’édifice (p. 217-218).
582. Notre-Dame-du-Pont ou du Largue
Cette chapelle est située à l’extrémité NO de la commune et sur le tracé de la via Domitia, aujourd’hui la N 100. Elle protégeait également un pont jeté sur le Largue dont Achard dit qu’il est fort élevé et fort ancien. Il est très bien dessiné sur le plan cadastral et la route est dite Route royale d’Apt à Forcalquier (section A 1). Provence Romane 2 nous apprend que Notre-Dame du Pont, qui a un recteur en 1274 et un prieur en 1351, est un édifice dont le plan est identique à celui de la proche chapelle Saint-Syméon de Lincel, mais beaucoup plus grand ; seuls sont appareillés le cul-de-four du sanctuaire, les encadrements de fenêtres et les angles de la construction ; les autres parties, par mesure d’économie, sont bâties en moellons irréguliers. Un ermitage qui présente une double porte en plein cintre parfaitement appareillée, prolonge vers l’Ouest cette église romane (p. 246). R. Collier date la partie inférieure de l’abside en petit appareil de taille assez régulier de la fin XIe-XIIe siècle. Il date la porte de la première moitié-milieu XVIIe siècle (p.149). Bien qu’étant dans le diocèse d’Aix, Notre-Dame dépend de l’évêché de Sisteron. Les pouillés de ce diocèse en 1274 citent en effet un rector ecclesie Beate Marie de Ponte et un prior de Ponte en 1351 (p. 120).
Curieusement au XIXe siècle la chapelle est dite parfois Notre-Dame de la Roque ou de la Roche ou Notre-Dame du Pont. C’est ce que révèle le coutumier de 1835 : le jour de la sollennité de la fête de la Nativité de la Ste Vierge, le matin, bon matin, on se rend en procession à une chapelle dite Nostre Dame de la Roche. On y célèbre la messe, ensuite on revient au village pour y célébrer la dernière messe (2 V 73). Le 21 avril 1874, la chapelle rurale ND de la Roque, à 3 kil. du village, elle est décente. Puis, en 1859, 1863, 1866 et 1871, la chapelle ND du Pont est convenablement entretenue (2 V 86 et 90). Si la paroisse dépend de Montmajour, Notre-Dame du Pont dépend de l’archevêque d’Aix. C’est ce que nous révèle Achard : l’Archevêque d’Arles nomme au petit bénéfice de N-D du Pont. Quand à Féraud, il confirme la procession : on trouve à l’extrémité du territoire et près de la rivière du Largue, une chapelle que l’on assure être fort ancienne, et où l’on se rend en procession le jour de la nativité de la sainte Vierge, 8 septembre (p. 381). Le PR reconnaît en Joseph Jullien le gardien de l’ermitage en 1774 (n° 23, p. 53).
583. Chapelle Saint-Trophime
C’est la CAG qui signale qu’autour de l’ancienne chapelle Saint-Trophime (non signalée par la carte IGN), située dans la plaine (sans doute au lieu-dit le Prieuré, au pied nord du village), nécropole gallo-romaine (datation non précisée). On y aurait découvert un cercueil en plomb contenant un squelette, divers objets et des monnaies romaines (p. 496). Cette chapelle n’apparaît pas sur le plan cadastral ni sur Cassini. La paroisse a comme patron saint Trophime et Achard rapporte qu’après saint Etienne il est le deuxième protecteur de la paroisse. Sa fête qui a lieu le 29 décembre donnait lieu à un roumeiragis.
584. Chapelle de la Grande Bastide
Seul R. Collier signale cette chapelle qui, de par la netteté de ses lignes, est un remarquable spécimen de l’art gothique du XVIIe siècle. Occupant le rez-de-chaussée du pavillon de droite, elle ne comprend qu’une travée ; de plan carré, celle-ci est voûtée sur croisée d’ogives ; les nervures se réduisent à deux tores se croisant et aboutissant à des culots. Des renfoncements ouvrent sur trois côtés, avec arcades brisées, pilastres et impostes (p. 179).
Synthèse
Il est sûr que le passage de la voie, romaine d’abord, royale ensuite, a favorisé la colonisation du terroir. On y relève des traces d’occupation antique et la fondation d’édifices religieux. La chapelle Notre-Dame du Pont semble bien avoir une fonction de protection sur le passage toujours risqué d’une rivière. Le site a pu succéder à un relais et à un péage. Saint-Trophime est sans doute la première église paroissiale ayant précédé celle du castrum. Le nom du titulaire se retrouve comme patron et la chapelle, quand elle était encore en état, faisait l’objet d’un pèlerinage.