Faisait partie du diocèse de Gap et de la viguerie de Sisteron, aujourd’hui dans le canton de La Motte-du-Caire. La commune s’étend sur 1530 hectares dont seulement une petite partie côtoie la rive gauche de la Durance, au nord de Sisteron. Elle s’étage ensuite sur des collines offrant des plateaux vallonés et boisés jusqu’au village perché à 832 mètres d’altitude. Les collines se poursuivent ensuite jusqu’à l’altitude de 900 mètres. L’habitat dispersé prédomine réparti en de nombreuses fermes et abrite plus d’habitants que le village. Celui-ci est en effet mal commode et s’il est propice pour la défense avec un château, il est difficile pour l’habitat, surtout par le manque d’eau. Le castrum apparaît au tout début du XIIIe siècle, castrum de Cigoier (GCN I, Inst. col. 284). L’église est dédiée à Notre-Dame et est desservie par un capellanus de Ciguerio en 1274. Dûrement touchée suite aux guerres de Religion, elle va être restaurée en 1683 et s’adjoindre le qualificatif d’Espavant. Une pierre de fondation et une plaque commémorative rappellent cet évènement.
482. L’église Saint-Benoît
Le monastère de l’abbaye d’Aniane s’est installé sur la commune voisine de Vaumeilh au lieu-dit Chane dès le XIe siècle. Les moines fondent également une église dédiée à saint Benoît sur le territoire de Sigoyer où ils possèdent des propriétés 1. Suite à la peste, le prieuré de Chane périclite et Saint-Benoît est abandonné. N’étant plus qu’un clapier, celui-ci est dégagé des arbres, arbustes et pierres il y a quelques années. Les restes de l’édifice sont très instructifs, car il n’a pas été restauré ni remanié depuis sa fondation, ce qui permet d’avoir une vision parfaite de ce type d’église rurale.
La chapelle, parfaitement orientée, est située au bord est du chemin reliant Les Sagnaires à l’est au Haut-Plan à l’ouest. Elle est sise en bordure d’un vaste plateau en grande partie cultivé, premier plateau surplombant celui où passe la route Valernes-Thèze-Claret. Le bâtiment est composé d’une nef unique, sans travées, donnant sur une abside semi-circulaire. La nef offre une superficie de 39 m². Les murs ont une épaisseur de 0,80 m. À l’intérieur, ils s’élèvent pour la partie nord sur 1,90 m, pour la partie sud sur 1,20 m. On ne constate pas de départ de voûte, les murs n’offrant pas une hauteur suffisante, ni de contreforts à l’extérieur. L’épaisseur des murs laisse supposer une couverture en charpente. Aucune lauze ni tuile canal ne subsistent aux abords. Par contre, on rencontre des fragments de tegulae. Les murs sont appareillés en lits réguliers avec de gros galets non travaillés, liés au mortier de chaux gris avec dégraissant de tuileaux. Deux ouvertures sont encore visibles : la porte d’entrée à l’ouest large de 1,68 m et une plus petite au sud de 0,75 m. Le matériau de construction a été prélevé sur place, seul, le tuf a été importé n’existant pas sur le site. Il a servi aux chaînages d’angles et aux piédroits des ouvertures. Les gros galets ne pouvant être taillés ont été traités tels quels, mais néanmoins choisis, en fonction de leur taille, pour constituer des lits horizontaux. Les parties vitales, par contre, ont exigé l’importation d’une pierre tendre, facile à travailler et à mettre en œuvre.
L’église était accompagnée d’un cimetière. Une indication est fournie par un document révélé par Marc de Leeuw où, durant la peste qui a sévi au XIVe siècle, un habitant de Sigoyer reconnaît que son père, mort de la peste, a été enseveli dans le cimetière avoisinant l’église Saint-Benoît ou à l’intérieur même de l’église. Il semblerait que c’est à la fin de cette période que le site, église et cimetière, ait été délaissé. Les guerres de Religion ont empêché par la suite, toute réhabilitation. Aucune mention n’en est faite dans les documents de l’église de Gap au XVIe siècle ni par la suite.
483. Saint-Cézaire, Champ de la Ville, Champ la Cour
Le cimetière de Sigoyer est éloigné du village de près de 1000 mètres et en contrebas. En plein champ, il est situé dans une zone de plateaux et coteaux fertiles vitalisés par des fermes et bastides isolées. Deux toponymes livrés par le cadastre napoléonien laissent envisager une colonisation carolingienne, Champ de la Ville et Champ la Cour. Le même cadastre cite le quartier Saint Cesari à l’emplacement du cimetière. Dans la commune de Thèze, limitrophe de celle de Sigoyer, les moines de Cluny sont installés depuis 998 et possèdent deux prieurés leur assurant un revenu confortable. L’un est à Thèze même, l’autre est situé à Sigoyer 2. Il est probable que le prieuré de Sigoyer soit situé dans cette zone où Marc de Leeuw et moi-même soupçonnons les ruines d’un édifice enfoui sous la végétation et les décombres aux abords mêmes du cimetière. Un dégagement et un sondage permettraient d’en avoir la certitude.
SYNTHESE
Si le prieuré de Cluny est beaucoup moins assuré que celui d’Aniane, on constate néanmoins des implantations en plein champ, pour desservir un habitat dispersé en fermes isolées. L’architecture de Saint-Benoît est exemplaire et permet de reconstituer presque dans son intégralité ce type de petites églises rurales assez méconnues.
1 Etude réalisée par LEEUW Marc de, Prieuré de Chane, SIVOM de La Motte-Turriers, 2000. L’ecclesia sancti Benedicti est citée en 1210.
2 AD HA G 872. Collation des prieurés de Thèze et de Sigoyer, résignés par Joseph du Serre, moine de Cluny, à Reynaud du Serre, seigneur de Thèze, son frère, moyennant une pension de 400 livres.