Les deux anciennes communes, réunies en 1974, faisaient partie du diocèse de Senez et de la viguerie de Castellane, aujourd’hui dans le canton de Saint-André-les-Alpes. La Mure est traversée par le Verdon et côtoie à l’ouest la commune de Saint-André-les-Alpes. Argens est perché dans la montagne au nord de La Mure avec un village établi à plus de 1300 mètres.

LA MURE

Mura est cité vers 1030 dans le cartulaire de Saint-Victor quand Pons, clerc et moine de Saint-Victor et son neveu Mainard, chanoine de Morerius, font don de tout leur héritage et de leur alleu à l’église Sainte-Marie de Mura qui est sise dans le castrum appelé Morerius, dans le comté de Senez. Le don consiste en manses, terres cultes et incultes, etc. (CSV II, n° 767, p. 112-113). En 1042 a lieu une deuxième donation (CSV II, n° 766, p. 111-112). Elle est effectuée par Belihildis et ses fils qui donnent une partie de leur alleu à l’église dédiée en l’honneur de la sainte Marie mère de Dieu qui est sise sous le mont appelé autrefois Morarius. Viennent ensuite les confronts des biens donnés. A l’Orient depuis collis Maurelli (Montagne de Maurel, 1771 m), en descendant in valle Christiano (?), et en suivant ledit vallon jusqu’au Viridionis (le Verdon) et à la fontaine Melas (les Mèles). Du midi, en suivant le fleuve jusqu’au ruisseau appelé Utiola (l’Issole). Au nord, dudit mont par la pente de la montagne appelée Maurellus (Clot Mouret, 1355 m) jusqu’à Nutiola (l’Issole). A l’ouest, en suivant ledit ruisseau qui court jusqu’au Verdon. On le voit, les biens donnés sont répartis de chaque côté du Verdon et couvrent une grande étendue. Il faut remarquer que le territoire du castrum est appelé Morerius et que l’église est dédiée à Sainte-Marie de Mura. C’est ce dernier nom qui va s’imposer pour dénommer la commune. Le prieuré et l’église sont cités régulièrement par le cartulaire (1). La possession de l’église et même la seigneurie sont confirmés par l’enquête de 1278 : l’église paroissiale dont le prieur est le seigneur P. Bermond et la collation de ladite église ou prieuré appartient au seigneur abbé de Marseille. Le seigneur Abbé de Saint-Victor de Marseille est seigneur dudit castrum (Enquêtes, n° 866, p. 435).

L’église est dédiée à sainte Marie et est sous le titre de l’Assomption comme on l’apprend plus tard. On lui a adjoint le qualificatif de Vauvert  à une époque indéterminée. Le coutumier de 1835 révèle que la fête patronale a lieu le 15 août et que saint Etienne est co-patron. Féraud confirme ces données (p. 270). Saint Etienne pourrait être le titulaire d’une église disparue desservant une communauté installée à Ville Haute. Féraud y place l’ancien village. Le toponyme révèle en effet une communauté qui pourrait être à l’origine du peuplement du terroir durant la période du haut Moyen Age. Le quartier de la Villaute est signalé par le cadastre de 1838 et les cartes IGN. Il est situé à l’est de la commune à environ 1200 mètres d’altitude. L’abbé Féraud estime que l’église a été reconstruite en 1700 et qu’il existe sur la montagne une chapelle dédiée à Notre-Dame-du-Rosaire qui paraît très ancienne puisqu’elle fut donnée en 1042 à l’abbaye de St-Victor. R. Collier doute quelque peu sur cette affirmation à cause de la porte de l’église qui présente un encadrement antérieur à cette date (p. 222). Si l’on reprend le texte de 1042 la donation est faite juxta fluvium Viridionem, près du fleuve Verdon. D’ailleurs, le cimetière, avant d’être transféré hors les murs, était sur la place actuelle de l’église et un bâtiment adjacent porte le nom de clastre, rappelant l’ancien prieuré des moines de Saint-Victor.

309. Chapelle Saint-Joseph

C’est la seule chapelle rurale mentionnée au XIXe siècle, à partir de 1858, il y a une chapelle à l’entrée du village du côté du levant dédiée à saint Joseph, servant pour les confrères, les pénitents, qui est très humide. En 1870 et 1876, il est dit qu’elle est en très bon état, ayant été réparée depuis la dernière visite de 1870. L’enquête sur les lieux de culte de 1899 reconnaît la chapelle S. Joseph autorisée à l’époque du concordat. Une messe par an et le 19 mars. Elle est toujours en état. Placée à une des entrées du village, cette chapelle de protection a dû être érigée au cours des XVIIe-XVIIIe siècles, la titulature à saint Joseph ne pouvant par être antérieure.



ARGENS

Le nom de la commune apparaît vers 1200 sous la même orthographe (Atlas, p. 160). L’enquête de 1278 nous apprend que l’église paroissiale dont le prieur est le seigneur P. Boarius, la collation de la dite église appartient à l’église de Senez. Seigneur Bt. de Rochavairia et Gau. de Aloncio, R. Faraudi et domine Dulcia de Medullia sont les seigneurs dudit castrum (n° 862, p. 434). L’église de Argensio, comme dite vers 1300 et 1376 par les Pouillés (p. 290 et 292), est sous le titre de Notre-Dame de Beaulieu. L’abbé Féraud la considère comme l’une des plus belles de la contrée ; on fixe sa construction en 1664. La fête patronale est célébrée le 15 août (p. 271). R. Collier la décrit succinctement : elle date de 1664-1667 et son choeur est voûté sur croisée d’ogives. Chevet plat, deux chapelles latérales voûtées d’arêtes, joli clocher-arcade à deux baies (p. 187).

Il n’est pas signalé de chapelle rurale, mais la CAG rapporte que à Chastelviel la tradition place un couvent des Templiers sur une éminence au pied du versant méridional de Cordeuil  (n° 136, p. 323-324).

310. L’ancienne paroisse Notre-Dame

C’est celle qui est citée à la fin du Moyen Age et se trouvait dans l’enclos du cimetière. Déjà en mauvais état en 1551, elle était presqu’en ruine en 1617 au sortir des guerres de Religion. Malgré plusieurs injonctions des évêques de Senez de la réparer, on préféra en élever une autre dans le village. Devenue simple chapelle dédiée au Rosaire, elle disparut peu à peu, Mgr Soanen, en 1708, la qualifiant d’ancienne paroisse. Aujourd’hui, il n’en subsiste plus une seule pierre (PR, n° 12, 1991, p. 15-17).

Quatre autres chapelles sont inventoriées par le PR (p. 35). Aucune d’entre elles ne figure sur la carte de Cassini et avaient disparu avant sa confection.

311. Chapelle Saint-Jean-Baptiste

Elle se trouvait au quartier du Peyron, en un lieu encore appele Pré de Saint-Jean. Le cadastre de 1838 situe ce quartier au nord du village.

312. Chapelle Saint-Sébastien

Elle se trouvait dans le jardin du presbytère, construite sans doute vers 1640 pour préserver le village de la peste. De cette chapelle il ne reste rien.

313. Chapelle Saint-Lazare

Elle était tout près du village et servait en hiver de paroisse pour éviter de se rendre à l’église paroissiale située dans le cimetière.  Elle est visitée par l’évêque de Senez en 1659, mais quand Mgr Soanen se rend à Argens en 1708, il la trouve abattue.

314. Chapelle Saint-Domnin

Chapelle rurale mentionnée en 1708 par Mgr Soanen.

 

Synthèse

La présence de l’église de la Mure dès 1030 laisse envisager une fondation antérieure. Le prieuré doté largement à ce moment à fixé la population autour de lui et créé le village. A Argens, l’église paroissiale d’origine, à cause de son éloignement du village, n’a pu se maintenir au-delà du XVIIe siècle. Les chapelles de protection élevées aus XVIe et XVIIe siècles, ont subi le même sort.


1. Cella sancte Marie de Mura en 1079, 1113, 1135 ; ecclesia sancta Maria de Mura en 1122 ;  prior de Mura en 1174 et 1337.

  • À propos de l'auteur : Daniel Thiéry