archeoprovence

communes

En 1973, les deux communes de Trévans et d’Estoublon sont fusionnées, la première dépendait de la viguerie de Moustiers, l’autre de la viguerie de Digne, toutes deux cependant dans le même diocèse de Riez.

TREVANS

Cette ancienne commune ne comprenait que 1175 hectares et n’a jamais été très peuplée, 90 habitants en 1315. Après avoir atteint 138 habitants en 1765, puis 118 en 1851, elle est tombée à 4 en 1962, d’où son rattachement à Estoublon (Atlas, p. 204). Trévans apparaît en 1157, territorium de Trevano, lors d’un jugement prononcé par le comte Raimond Bérenger II en faveur de l’abbé de Montmajour contre Guigue de Gaubert (GCN, I, Inst. col. 203). Un castrum se forme cité vers 1200 avec une église paroissiale desservie par un prieur en 1274, prior de Trevano. En 1351, l’église de Trevans, ecclesia de Trevanis, est desservie par le clergé séculier et dépend du diocèse de Riez (Pouillés, p. 106 et 111). Elle est sous la titulature de Notre-Dame et a comme patron saint Barthélemy. Aujourd’hui, la carte IGN signale le village et l’église comme ruinés.

180. Le monastère Saint-André-du-Désert

Il est mentionné par tous les auteurs depuis Bartel. Celui-ci nous apprend que Trévans était un pagus siège d’un très ancien monastère de l’ordre des Carmes sous le titre de Saint-André du Désert fondé en 1450. L’ancienne abbaye était sous le titre de Saint-André de Bosco. L’abbé Féraud en dit un peu plus : il y avait autrefois, dans ce lieu, un monastère de Religieux Carmes, sous le titre de Saint-André-du-Désert. Les Carmes en avaient pris possession en 1450 et était le second couvent des Carmes en France. On prétend qu’il avait été fondé par Jacques d’Apéricoul, seigneur de Gaubert. Le comte de Carcès le fit démolir en 1575, de peur que les Religionnaires ne s’en emparassent et ne s’y établissent comme dans un lieu fortifié. Les religieux se retirèrent, dès lors, dans le village d’Estoublon. Avant eux, cette maison de Saint-André était une abbaye sous le titre de Saint-André-de-Bosco, du Bois. L’église subsiste encore et l’on voit tout autour les ruines du monastère (p. 109) (1). C’est l’évêque de Riez, Jean Fassi (1450-1463), Général de l’ordre des Carmes, qui fonda dans son diocèse un établissement de religieux de son ordre à Saint-André-du-Désert dans le terroir de Trévans (GCN I, col. 618).

Les visites pastorales du XIXe siècle citent l’ancienne église du monastère comme une simple chapelle rurale, rappelant à la fois sa titulature à saint André et son ancienne appartenance à l’ordre des Carmes. Selon Féraud, l’ancienne église Saint-André attire chaque année un grand concours des pays voisins, la deuxième fête de Pentecôte. Elle est aujourd’hui en ruine. La CAG situe l’ancien monastère fondé au XIIIe siècle à l’entrée des Gorges de Trévans, au sommet d’un impressionnant piton rocheux. Dans les éboulis, ont été retrouvées des traces d’occupation protohistorique et gallo-romaine (CAG, n° 084, p. 193). La question qui subsiste est celle de savoir qui a fondé le premier monastère au XIIIe siècle et quel ordre religieux le desservait. Aucun des auteurs ne donne le moindre renseignement sur ce sujet et nos recherches sont restées également vaines. On peut conclure cependant que le site est perché loin de tout, favorable à la vie érémitique, d’où son appellation du Désert  et qu’il a attiré les hommes depuis l’Antiquité. Il a servi de lieu de refuge et de place force vu sa position stratégique, aussi bien durant l’Antiquité qu’à la période du Moyen Age jusqu’aux guerres de Religion.


ESTOUBLON

L’ancienne commune était deux fois plus étendue que celle de Trévans, 2209 hectares. Son territoire, arrosé par l’Asse et l’Estoublaisse, était également plus favorable à la colonisation humaine. Celle-ci se dévoile déjà durant l’Antiquité avec plusieurs sites remarquables, principalement dans les deux vallées et sur les terrasses les dominant. Une voie antique présumée sur la rive droite de l’Asse traverse le territoire, reliant Riez à Digne et l’on connaît Estoublon, villa Stublonem, dès le VIe siècle par Grégoire de Tours qui relate un combat victorieux du patrice Mummolus sur les envahisseurs saxons et lombards (2).

C’est en 1011 qu’Estoublon réapparaît avec la fondation d’un monastère dépendant de l’abbaye de Montmajour. Svigo et Heldebert accompagnés de leurs femmes font don à l’abbaye de l’église Saint-Pierre d’Estoublon ainsi que d’autres dédiées à la Vierge Marie, à saint Domnin et à saint Saturnin. Ils offrent en outre tout un lot de terres composées de champs, de vignes, d’oliviers, de vergers, etc., ainsi que des moulins. La donation est faite au seigneur abbé Archinric pour lui et ses successeurs. Sont donnés ensuite les confronts du territoire offert. C’est lors de cette donation que le lieu de Carluc est également donné à Montmajour (voir Céreste) (3). En 1096, l’évêque de Riez Augier confirme la possession et y ajoute les églises de Saint-Julien d’Estoublon et de Saint-Pierre de Calveti (?), le quart des dîmes de castro Rogone (Rougon) et quartam partem de castro sancti Georgii (GCN I, Inst. XI, col. 371-372). Au cours du XIe siècle, Rostang, fils de Rainard, fait don de la cinquième partie du lieu de Norante au diocèse de Senez (4). Il faut que le comte de Provence, Raimon Bérenger II intervienne en 1157 pour empêcher le seigneur Guigue de Gaubert de prélever les taxes sur les hommes de l’église d’Estoublon (GCN, I, Inst. col. 203). Il s’agit du même seigneur ou du moins de la même famille qui exerçait des vexations contre les habitants de Saint-Georges de Sargan en 1171 (voir Le Chaffaut). Mais ici c’est l’évêque de Digne qui intervient au nom du pape Alexandre III. Les moines d’Estoublon subsistèrent difficilement jusqu’au XIVe siècle, leur établissement se dégradant. Aussi, le monastère fut uni en en 1356 à la chambrerie de Saint-Victor.

Si Estoublon est cité dès le VIe siècle, puis au Xe siècle, il apparaît qu’il fut également habité durant la période carolingienne. Une stèle ou cippe carolingien a été trouvé vers 1870 dans le sous-sol de l’église paroissiale, sans doute une crypte maintenant comblée. La stèle, datée de 814, portait l’épitaphe d’une religieuse nommée Frodberta. Cette église était originellement dédiée à saint Pierre mais prit ensuite la titulature de Notre-Dame tout en gardant saint Pierre comme patron. Il ne subsiste de l’église romane que l’abside que l’on date de la seconde moitié du XIe siècle, le restant ayant été construit au cours des siècles suivants (5). Les visites pastorales du XIXe siècle ne signalent qu’une chapelle rurale, celle du hameau de Bellegarde, alors qu’il en existait d’autres. Un autre site d’origine carolingienne est celui de la villa nomine Abiacum faisant partie des biens de Fouquier père de Mayeul recensée en 909 (CLU I, n° 106, p. 119). Le quartier d’Aby est situé au NE du village sur la rive gauche de l’Asse.  

181. Chapelle Notre-Dame de Vie

Elle se trouvait dans la partie haute du village et était accompagnée d’un cimetière ; elle fut détruite en 1967. D’après les archéologues elle fut reconstruite au XVIe ou XVIIe siècle sur un édifice du XIe siècle. On y a trouvé un bas-relief de pierre représentant un chasseur et des animaux, une stèle anépigraphique et deux fragments de colonnes antiques, ces éléments pouvant se rapporter à un temple antique. Près du cimetière dit Cimetière vieux, s’étend une nécropole antique ou carolingienne avec des tombes sous tegulae (CAG p. 192-193). Le qualificatif Vie pourrait se rapporter à la voie antique qui passait à proximité. Située tout en haut du village, cette église pourrait être l’église paroissiale d’origine, tandis que celle de Saint-Pierre était l’église des moines. Au XIVe siècle, les moines partis, leur église est devenue paroissiale et la première a été abandonnée. C’est ce que pourrait suggérer le Pouillé de 1274 où sont mentionnés un prieur et un chapelain. Le site de la chapelle pourrait correspondre à l’ecclesia in honore Sancte Marie citée en 909 immédiatement après la villa Abiacum suivi de la villa Pauliniacum, aujourd’hui Polignac au NNO du village.  

182. Chapelle Saint-Jean

Elle est élevée sur la colline dite de St-Jean  située à 300 mètres à l’est du village, signalée ruinée par les cartes actuelles. Cette colline idéalement placée au confluent des deux rivières présente un petit plateau de 50 sur 1000 mètres qui a pu constituer un petit oppidum de type éperon barré. Des vieux murs, un reste peut-être de tour au centre, font penser à un réduit protohistorique. Près de la chapelle, ont été observés des fragments de tegulae. Le cadastre napoléonien de 1812 la figure dans la section B 2, parcelle 842, avec une abside en hémicycle orientée à 70°. Elle est aujourd’hui en ruine.

183. Chapelle Sainte-Anne

Elle figure comme celle de Saint-Jean sur la carte de Cassini, située entre le village et Saint-Jean. Elle est en ruine aujourd’hui et n’est pas signalée au XIXe siècle.


184. Chapelle Saint-Savournin

Elle aussi figure sur Cassini au hameau du même nom situé au SE du village. Actuellement il ne reste que des ruines. Il s’agit peut-être de l’église Saint-Saturnin nommée en 1011.

185. Chapelle Saint-Joseph à Bellegarde

C’est la seule qui est mentionnée lors des visites pastorales du XIXe siècle. Elle est qualifée de rurale et en bon état en 1860, 1866, 1872 et 1891. C’est en 1899 que l’on apprend qu’elle est sous la titulature de saint Joseph et qu’on dit seulement la messe le jour de la fête du saint. Elle apparaît en bon état sur les cartes actuelles.


Synthèse

Le territoire de la commune apparaît particulièrement riche en domaines carolingiens avec les villae d’Aby et de Polignac et également avec l’église Notre-Dame de Vie. Il est ensuite vitalisé par l’abbaye de Montmajour dès le début du XIe siècle.


(1) Lire également les deux pages consacrées à ce monastère par l’abbé Féraud, dans ses Souvenirs religieux, p. 152-153.

(2) Carte Archéologique, n° 084, p. 190. Alpes Romanes, p. 52-53. Féraud, p. 109.

(3) Le texte de la donation est fourni par Papon II, Preuves n° IV. Voir également La France pontificale, Riez, p. 318. Féraud, Souvenirs Religieux, p. 50-51.

(4) Chartes du XIe siècle, dans Catalogue des chartes antérieures au XIe siècle (687-1112), par A. Villard et E. Baratier, Arch. des B-d-R, Marseille, 1998, p. 51, n° 54. Se reporter à l’article Chaudon-Norante.*

(5) Alpes Romanes, p.  52-53. Collier, p. 138-139.

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Faisait partie du diocèse de Riez et de la viguerie de Moustiers, aujourd’hui dans le canton de Riez. C’est en 1973 que les deux communes d’Esparron et d’Albiosc sont fusionnées. Il n’est pas assuré que la colonica in Albiosco citée par le polyptique de Vadalde de 814 corresponde à l’Albiosc de la commune d’Esparron (CSV II, F, p. 637). En effet, la villa Betorrida dans laquelle est placée la colonge d’Albiosc serait située intégralement selon les auteurs actuels dans la commune de Forcalquier. Par contre, il est possible qu’Albiosc était durant l’Antiquité le siège ou le vicus de la tribu des Albici (1). Le vicus d’Albiosc a, semble-t-il, continué de propérer durant le haut Moyen Age car au début du premier millénaire il est presque deux fois plus peuplé que le territoire d’Esparron. En 1315, il compte 62 feux tandis qu’Esparon n’en dénombre que 36. En 1400, il est inhabité et ne retrouvera jamais plus sa prospérité passée avec 106 habitants en 1851 tandis qu’Esparron dépassera les 550 habitants (Atlas, p. 159 et 174). Les deux communautés vont échoir à l’abbaye de Lérins, en 990 pour Esparron, en 1103 pour Albiosc.

ESPARRON

Le castrum d’Esparron est déjà cité en 990, castrum Sparronis, ce qui indique un perchement et une place fortifiée précoces (CL, CCXXII, p. 225-226). Le donjon, qui représente la partie la plus ancienne du château, ne date cependant que du XIIIe siècle (Collier, p. 245-246). Le castrum est cité ensuite en 1204, puis en 1237, castrum de Sparrono (RACP, n° 35 et 278). L’église apparaît en 1274 avec le prior de Sparrono, puis en 1351 où l’on remarque la prebenda de Sparrono, signe que l’église dépend du chapitre de Riez et est desservie par un vicarius de Sparrono (Pouillés, p. 106 et 110). Elle est sous la titulature de saint André (Bartel, p. 67), auquel on va adjoindre la protection du titulaire d’un prieuré disparu de Lérins, saint Vincent (Abbayes et Prieurés, p. 62). Le  patron de la paroisse est sainte Madeleine qui possède une chapelle rurale dans le terroir (Féraud, p. 153).

176. Le prieuré lérinien de Saint-Vincent

La première donation à Lérins date de 990, elle est faite par Germundus à une église dédiée au bienheureux Vincent martyr qui est située près du castrum Sparonnis in Bulzolschi valle. Cette église a été consacrée par Almérade évêque de Riez (990-1030 selon GCN). La donation consiste en plusieurs terres dont sont donnés les confronts. Une deuxième donation a lieu entre 1066 et 1102, faite par Odon et son épouse Bellefleure, qui donnent tout de l’héritage qu’ils possèdent en terres, vignes et autres (CL CCXXVII, p. 232). Il apparaît avec le premier texte que l’église Saint-Vincent vient d’être édifiée et a été dotée par Germond. L’appartenance à Lérins est ensuite confirmée en 1259 par le pape Alexandre IV, in diocesi Regensi, ecclesia Sancti Vincentii de Spareto (CL II, n° IV, p. 6). Le prieuré n’apparaît plus ensuite, mais on sait seulement qu’il fut uni à la sacristie de la cathédrale de Riez avec l’église paroissiale d’Esparron (2). Il est probable qu’il fut abandandonné et détruit suite aux fléaux des XIVe et XVe siècles ; il ne restait que 8 foyers sur la commune en 1471.

Le prieuré, comme le relate le texte de 990, est près du castrum, juxta castrum Sparronis. On peut le situer au lieu-dit St-Vincent à 1500 mètres au NNE du village sur le Ravin de Bellioux (Bulzolschi valle ?) C’est dans ce secteur que la CAG (n° 081, p. 188-189) signale plusieurs découvertes, dont une nécropole du haut Moyen Age, une tombe en coffres de lauze, quatre sous tuiles et d’autres en pleine terre. Nous sommes en présence à cet endroit d’un site occupé depuis l’Antiquité auquel a succédé une villa carolingienne puis un prieuré fondé par l’abbaye de Lérins. Le nom de Saint-Vincent a donné son nom à la section A du cadastre napoléonien.

177. La chapelle Sainte-Madeleine

Elle est citée lors des visites du XIXe siècle à partir de 1845 avec une autre dédiée à sainte Anne. Jusqu’en 1893, sur les deux chapelles, il en existe une en ruine. Celle de Sainte-Madeleine est placée au bord de la route qui conduit à Albiosc, à 800 mètres à l’est du village. La titulature à Madeleine semble récente car sur le cadastre napoléonien de 1825 elle est sous le patronage de Notre-Dame (Section B 3, parcelle 1188). Elle est figurée avec une abside en hémicycle orientée au NE et le chemin qui la côtoie est dit Chemin de Notre Dame.

178. Chapelle Sainte-Anne

Elle est mentionnée en même temps que celle de Sainte-Madeleine et est située dans le village.


ALBIOSC

Comme nous l’avons dit plus haut, Albiosc est cité le 24 mai 1103 lors de la donation faite par l’évêque de Riez Augier de l’église Saint-Pierre à l’abbaye de Lérins (CL CCXVIII, p. 221-222). Une bulle du pape Alexandre IV de 1259 confirme la possession d’Albiosc, in diocesi Regensi, castrum de Albiols cum ecclesiis ejusdem castri et omnibus pertinentiis eorumdem (CL II, IV, p. 6). Un inventaire des biens du prieuré a lieu le 17 octobre 1338 qui décrit d’abord le bâtiment du prieuré, puis une grande condamine située sous le prieuré qui confronte les chemins qui vont à Esparron et à Quinson, une ferrage qui confronte le cimetière de l’église, un jardin clot, un pré situé près du moulin, une autre condamine située à Peracedas, une terre au lieu-dit Pinada, quelques terres contigues au quartier Saint-Marcel confrontant l’église Saint-Marcel, une terre au lieu-dit Bosco près du chemin qui va à Montpezat, une autre terre au lieu-dit Aguderius, une autre à Plano de Silva et enfin une condamine située dans le territoire de Quinson au lieu appelé Pradellis (CL 2, LXXXIV, p. 144-147).

Le prieuré va perdurer jusqu’à la Révolution. Une pancarte de 1729 dénombre les prieurés et chapelles dépendant du monastère de Lérins, dont le château d’Albiosc et les églises dudit lieu (ADAM H 137, p. 42). Ce prieuré est toujours lié à celui de Quinson et c’est le prieur d’Albiosc qui désigne celui de Quinson, mais il y a souvent des litiges entre les deux prieurs au sujet, entre autres, du prèlèvement des dîmes ou des réparations à effectuer aux églises (ADAM H 849 à 862). L’église paroissiale est sous le titre de Saint-Pierre-ès-Liens et est desservie par le prieur du prieuré, prior de Albiosco. Les visites pastorales ne mentionnent aucune chapelle rurale au XIXe siècle, pourtant, il en existait une, sortie des mémoires.

179. Eglise Saint-Marcel

Nous l’avons décelée plus haut lors de l’inventaire des biens du prieuré établi en 1338, au quartier Saint-Marcel avec l’église Saint-Marcel, ecclesia Sancti Marcelli. Parmi les toponymes cités par ce texte, seul ce dernier figure encore sur le cadastre napoléonien et les cartes modernes sous la forme de deux lieux-dits contigus, le Grand St Marcel et le Petit St Marcel.  Seul le cadastre de 1824 révèle peut-être la trace d’un édifice religieux. Dans la section A 1, parcelle 22, au Petit St Marcel, est figuré un bâtiment rectangulaire prolongé par une abside en hémicycle orientée vers l’est. Cette présence d’une deuxième église explique les mentions de 1259 et de 1729 où sont dénombrées les églises dudit castrum ou dudit lieu. Mais cette deuxième église reste une énigme, n’étant mentionnée qu’une seule fois, en 1338.

Synthèse

A Esparron on connaît la date d’érection du prieuré lérinien Saint-Vincent, mais il est possible que ce soit une re-fondation sur un site déjà investi, comme en témoignent la nécropole et les tombes découvertes à proximité. A Albiosc, l’église Saint-Marcel semble être un lieu de culte associé à un domaine, celui-ci pouvant dater de l’époque carolingienne.

 


(1) C’est ce que suggère J.-P. Poly dans « La petite Valence,…. », Saint-Mayeul et son temps, Digne, 1997, p. 142. Par contre G. Barruol place plutôt les Albici dans la région qui s’étend du Luberon au plateau d’Albion, Les peuples préromains du Sud-Est de la Gaule, CNRS, Paris, 1973, p. 273-277.

(2) Bartel, p. 67 et Abbayes et Prieurés, p. 62. Féraud dans ses Souvenirs Religieux (p. 45) atteste que la paroisse était une prébende attachée à la dignité de sacristain du chapitre de Riez. Aucun des auteurs ne fournit la date d’union à la sacristie.

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Faisait partie du diocèse de Gap et de la viguerie de Sisteron,  aujourd’hui dans le canton de Volonne. Sur la rive gauche de la Durance, en face de Château-Arnoux sur la rive droite, L’Escale fut un port fluvial important durant l’Antiquité. Il était situé au Bourguet et avant que ne soit construit le lac artificiel de Château-Arnoux, les découvertes archéologiques ont été denses et variées (CAG, n° 079, p. 180-187). Ce port était idéalement placé à la jonction des voies terrestres provenant des Alpes-Maritimes et du delta du Rhône. Le site est abandonné, semble-t-il au début du Ve siècle, puis repris au début du premier millénaire. Mais il n’est pas assuré, par manque de documents, que l’activivté ait été compètement abandonnée entre temps.

L’Escale, Scala, apparaît en 1060 et dans les années suivantes, grâce à des dons faits à l’abbaye de Saint-Victor de Marseille par une puissante famille de Volonne qui possède de nombreux biens sur Volonne, L’Escale, Bezaudun, Dromon et Mirabeau.

CSV (II, 704, p. 50-52). En 1060,  Pierre de Volonne, fils d’Isnard et de Dalmatia donne à Saint-Victor quelque chose de son héritage et son propre alleu, dans les deux castra de l’Escale et de Bezaudun (à Malijai) et dans tous leurs territoires, en suivant la Durance jusqu’à La Bléone et en remontant la Bléone jusqu’à l’église de Sainte-Marie au Roures (Sainte-Marie de Rorabelle de Bezaudun à Malijai), et d’autre part, en remontant le ruisseau appelé Virongus (Vignorgues) au Serre de Paliairols (1) (Paillerous), par la Fubie (ruines) et passe au milieu de Paliairols jusqu’au Puy Aigû (2).

CSV (II, 703, p. 49-50). En 1061, Pierre de Volonne, fils d’Isnard et de Dalmatia, donne, de son propre alleu, aux églises de sainte Marie et de sainte Concorce qui sont fondées dans le lieu dit Mandanmus, la partie du cimetière qui lui appartient, deux manses dans ledit territoire, avec le defens du bois appelé Aias. Nous donnons en plus un manse dans le territoire de Dromon lequel est tenu par Galbert et Stéphane son frère. Tout cela étant dans le comté de Gap et dans le territoire de Volonne.

CSV (II, n° 705, p. 52-53). En 1063, Bilisma, fille de Vuandalmoys, épouse de Pierre de Volonne, fait don, après sa mort,  à Saint-Victor de sa dot qui est dans les territoires de l’Escale et de Bezaudun.

CSV (II, n° 870, p. 260-261). En 1180, il y a controverse entre les moines de Saint-Victor et les chanoines de Chardavon au sujet des églises de Saint-Martin de Cornillon, de Bezaudun et de l’Escale. L’archevêque d’Aix, Henri, en présence du seigneur Pierre, évêque d’Apt et du seigneur Bermond de Sisteron, du seigneur Grégoire évêque de Gap, décide d’attribuer l’église de l’Escale avec sa paroisse, tant du bourg que du castrum, aux moines de Saint-Victor. Pour ce qui est des églises de Bezaudun avec sa paroisse et de Saint-Martin de Cornillon (Saint-Martin à Volonne), elles sont attribuées aux chanoines. Acte passé à Sisteron.

Ces textes nous font découvrir le castrum de Scala, deux églises sous le titre de Sainte-Marie et de Sainte-Consorce situées à Mandanmus ou Mandanuis et deux agglomérations, celle du bourg et celle du castrum. Il y a donc, en ce XIe siècle deux communautés, l’une dans un castrum, l’autre à Mandanuis. Elles seront indépendantes jusqu’à la fin du XIVe siècle pour n’en faire plus qu’une au XVe siècle.

172. Le castrum et l’église Saint-Michel

Le castrum était situé sur une colline dite Vière et également Ville Vieille à 1500 mètres à l’ouest du village actuel de l’Escale, quelques 150 mètres en altitude plus haut. Il est déjà cité au XIe siècle. Il est probable qu’il réinvestit un lieu d’observation et de défense construit à l’époque romaine. On y découvre en effet des débris de tuiles romaines et de dolia ainsi que des restes de murs typiques de cette époque. Le village n’était pas au sommet de la colline où s’élevait une tour de défense dont il reste quelques débris, mais un peu en contrebas sur une terrasse aménagée dans la pente. Le castrum est ensuite cité en 1232 et 1236, castrum de scala (RACP, n° 163, p 263 et n° 262, p. 347). En 1315, l’Escale comprend 67 feux, soit près de 340 habitants, ce qui est relativement important par rapport à Mandanois qui ne compte que 29 feux. Entre la tour et le village, subsistent aujourd’hui les ruines d’une chapelle dédiée à saint Michel. Mais il est difficile d’y reconnaître une église paroissiale vu son exiguité et sa petitesse, incapable d’accueillir la population importante du XIVe siècle. L’Abbé Maurel pense que ce qui subsiste de l’édifice est seulement l’ancien chœur de l’église (p. 176-177). Le cimetière de la communauté villageoise la jouxte. L’église est mentionnée en 1135 lors de la confirmation par le pape Innocent II des possessions de Saint-Victor, ecclesia parrochialis de Scala en même temps que la cella sancte Marie de Mandanvis (CSV II, n° 844, p. 227). Elle resta paroissiale jusqu’au milieu du XVIIe siècle et devint ensuite une simple chapelle. A l’époque de l’abbé Maurel, Ville Vieille était déjà abandonnée et la chapelle sans service religieux. Aujourd’hui, il n’en subsiste que le mur de chevet et les murs latéraux.

173. La chapelle Sainte-Consorce

On a vu plus haut qu’elle est citée dès 1061 en même temps que l’église de Mandanois et dotée par Pierre de Volonne de terres et de manses. Une tradition tenace veut que sainte Consorce soit la fille de saint Eucher  et de sainte Galle, également sœur de sainte Tulle qui vivaient au Ve siècle. Après la mort de ses parents, elle vint s’installer dans un de ses domaines dénommé Mocton ou Mathon vicus qui pourrait être situé à l’Escale et plus précisement à Mandanois. Elle y fonde un hospice pour les voyageurs ainsi qu’une église dédiée à saint Etienne. A sa mort, on ensevelit sa dépouille dans la chapelle qui prend désormais son nom (3). On a cherché en vain les reliques de la sainte. En 1761 l’évêque de Gap se rend à la chapelle des pénitents qui est au milieu du cimetière et où la tradition porte qu’est le corps de Sainte-Consorce, ce qui engagea à fouiller dans la terre pour le chercher (4). La recherche fut infructueuse, mais la tradition fut conservée, comme en 1899 lors de l’enquête sur les lieux de culte : au hameau de l’Hôte, chapelle de Ste Consorce, avec messe quatre ou cinq fois par an ; existait dès le XIe siècle sur l’emplacement d’un hôpital bâti par la fille de St Eucher. Elle était située à quelques mètres au sud de l’église paroissiale de l’Escale, au hameau de l’Hôte où elle est bien visible sur le cadastre napoléonien (section B 2, parcelle 215), séparée de l’église par le cimetière. Elle est figurée avec une abside en hémicycle orientée vers l’est. Elle a été complètement détruite en 1962.

174. La chapelle de la Vierge au hameau des Cléments

Aujourd’hui ce hameau ne fait plus qu’un avec celui de l’Hôte pour former le village de l’Escale. L’abbé Maurel nous apprend que la chapelle a été fondée et livrée au culte en 1870 après une souscription publique sur un terrain donné par M. Amayenc (p. 9 et 177). C’est ce que confirme plus ou moins précisément l’inventaire de 1906 : chapelle de l’Immaculée Conception au hameau des Cléments appartenant à la Fabrique, donnée par Mme Féraud veuve Amayon. 100 m², meublée. Elle a été restaurée ces dernières années et accueille un atelier-exposition de peinture.

175. Chapelle Sainte Anne au hameau de Coulayès

Cette chapelle, dont l’abbé Maurel reconnaît n’avoir rien trouvé la concernant dans les archives est citée à partir de 1858. Lors de l’enquête sur les lieux de culte de 1899,  il est dit qu’on y fait une procession une ou deux fois par an. L’inventaire de 1906 lui donne une contenance de 40 m² et reconnaît qu’elle est abandonnée. Elle figure sur le cadastre de 1810, section B 3, parcelle 1273. Aujourd’hui, elle vient d’être restaurée.

Il reste deux chapelles signalées par l’abbé Maurel, Saint-Martin de Cornillon et Saint-Pierre de Bézaudun. Pour la première, les auteurs modernes la situent à Volonne et pour la seconde nous situons le castrum de Bézaudun à Malijai, en rive droite de la Bléone (voir ces deux communes).

Synthèse

Le port fluvial de l’Escale, romain d’abord, puis repris par la suite, a favorisé l’implantation du christianisme, sans doute très tôt, comme en témoigne la tradition concernant sainte Consorce. Sa chapelle et celle de Sainte-Marie sont confirmées en 1061, signe de leur existence antérieure. Il est regrettable que la chapelle Sainte-Consorce ait été détruite il y a peu de temps.


(1) Le CSV de Guérard place ce quartier aux Mées, alors qu’il s’agit d’un quartier de Volonne.

(2) Ce texte a été diversement interprété pour la localisation des lieux-dits. Esmieu, en 1803, dans son Histoire des Mées place Bezaudun sur la rive gauche de la Bléone et descend jusqu’au Paillerols des Mées. Cette version est reprise par De Laplane et Guérard. Nous pensons avec l’abbé Maurel dans son Histoire de l’Escale, en 1893, p. 34 à 44, que tout le domaine donné à Saint-Victor s’étend sur la rive droite où l’on retrouve tous les lieux-dits cités par le texte. Sur Bézaudun, voir le chapitre sur Malijai.

(3)  Sur  la vie de sainte Consorce, F. Trouche, Ephémérides des saints de Provence, M. Petit, 1992, p. 68-70. Egalement Féraud, p. 476. Collier, p. 409, qui reconnaît une sorte de crypte paléochrétienne qui devait exister dans la chapelle Sainte-Consorce.  De même Carte Archéologique, p. 181.

(4) Cité par Maurel, p. 178-179.

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Faisait partie du diocèse de Riez et de la viguerie de Digne, aujourd’hui dans le canton des Mées. Le village est perché sur une colline dominant la vallée de la Rancure. Le territoire de près de 3000 hectares est composé de plateaux et de coteaux entrecoupés par de nombreux torrents. La population atteignait les 730 habitants en 1315, mais était réduite à 180 en 1471. Elle va retrouver à peu près le nombre de 1315 en 1765 (646 habitants), puis décroître de nouveau pour aboutir à 112 en 1962 (Atlas, p. 174). Le castrum de Antravenis est cité en 1252 joint à celui du Castelleto, le Castellet (Enquêtes n° 568, p. 35). En 1274, sont cités un prior de Antravenis et un capellanus de Antravenis, puis en 1351 l’ecclesia de Antravenis (Pouillés, p. 106 et 112). Le prieur et le chapelain cités en 1274 évoquent deux églises, une paroissiale et une priorale. L’église paroissiale, dans le village, est celle du castrum. Elle est d’origine romane avec de nombreux remaniements et des adjonctions postérieures (1). Elle est dédiée à Notre Dame et a comme patron saint Martin. Féraud précise qu’il s’agit de Notre-Dame de l’Assomption. Bartel annonce qu’elle est sous le sous le titre de la B. Marie de villa veteris (p. 53-54). Cette dénomination que l’on peut traduire par ville vieille fait appel à un habitat abandonné qui ne peut correspondre à celui du village perché. Il faut donc chercher quel peut être cet ancien habitat.

169. La chapelle Notre-Dame de Santé sur un site antique

La première citation date de 1730 dans un Pouillé du diocèse de Riez, chapelle Notre-Dame de la Santé, fondée depuis trois ans dans le terroir d’Entrevennes, le sieur Augustin Martin bourgeois d’Entrevennes en est le patron laïc (5 G 4). Elle répparaît lors des visites pastorales de 1845 à 1892 sous le titre de Notre-Dame, mais sans commentaire. En 1888, on signale cependant qu’elle a été restaurée. Ce n’est qu’en 1899 qu’elle revient sous sa première appellation, chapelle Notre Dame de Santé, à un quart d’heure du village, donnée à la Fabrique en 1828 ; messe deux fois par an et quand les habitants le demandent.

La chapelle, encore en bon état actuellement, est implantée en plein champ, en légère surélévation sur un tertre semble-t-il artificiel et à l’aplomb de la vallée, à quelques 1000 mètres du village. Elle côtoie à l’est l’ancienne route allant à Saint-Julien d’Asse. L’édifice orienté vers l’est est composé de deux corps, celui de l’ouest étant plus récent que le coté du choeur et de l’abside. La porte d’entrée, à l’ouest, porte sur la clef de l’arc plein cintre de l’encadrement la date de 1856 (2). Seule cette façade est crépie, les autres murs présentant un appareil formé de galets disposé en lits plus ou moins rectilignes, noyés dans du mortier.

Aux alentours, dans les champs de lavande, traînent des fragments de tuiles romaines que ne signale d’ailleurs pas la CAG. Le quartier porte deux noms, Notre-Dame ou Plaine Notre-Dame et Rome, ce dernier toponyme donnant son nom également à un ravin. Les paroissiens ont doté et entretenu la chapelle et y viennent au moins deux fois par an en pèlerinage. La fondation du sieur Martin en 1727 n’est pas une création, seulement une dotation de la chapelle. Le pèlerinage est un retour, comme bien souvent, aux origines de la communauté. Il s’agit peut-être du premier habitat précastral installé sur un site antique et dont la titulature à Notre Dame a été repris pour l’église du castrum. C’est pourquoi elle était dite Notre-Dame de villa veteris.

170. La chapelle Saint-Michel du cimetière

Figurée sur Cassini et sur le cadastre de 1824, cette chapelle est située aux abords du village, près de la route menant à Saint-Julien d’Asse. Elle est accompagnée du cimetière de la communauté. Elle est citée lors des visites pastorales du XIXe siècle et en 1899 la chapelle S. Michel, attenante au cimetière, sert aux enterrements. Messe deux fois par an ; date inconnue ; non autorisée. L’édifice, orienté à 110°, présente un long vaisseau avec un chevet plat. Ce dernier offre, à la base, trois lits superposés horizontaux formés de gros galets de même calibre. On retrouve cet appareil également dans la base du mur côté route. L’entrée présente une porte que l’on peut qualifier de « cochère » formée par un arc légèrement surbaissé. Les piédroits, composés de moellons équarris, présentent une large moulure chanfreinée. De chaque côté de la porte, aux angles, deux gros piliers de forme ronde, engagés dans le mur, donnent à l’édifice une allure de petit château. Au-dessus de la porte, oculus ouvert vers l’extérieur. Sur le faîte clocheton portant une cloche. L’édifice aujourd’hui n’est pas en très bon état et sert d’entrepôt.

Cette chapelle pose problème car elle présente des éléments que l’on peut attribuer à l’époque précastrale. L’orientation vers l’est est d’abord une caractérisque de la période romane et l’appareil lité en galets que l’on remarque à la base des murs renvoie au premier âge roman, fin Xe-XIe siècles. Il faudrait donc placer cette église avant celle du castrum. Elle est d’ailleurs en milieu ouvert, non défensif, accompagnée du cimetière, ce dernier ayant continué sa fonction de champ des morts pour la communauté. Il est possible qu’elle soit celle qui est desservie par un prieur en 1274, tandis que celle du castrum, l’est par un chapelain. En 1351, elle n’est plus citée, seulement l’église du castrum, ecclesia de Antravenis.

171. La chapelle du hameau d’Ajonc

Elle est citée au XIXe siècle, mais ne semble pas figurer sur la carte de Cassini, ce qui indiquerait une édification au début du XIXe siècle. C’est l’abbé Féraud (p. 183) qui nous fait connaître sa titulature, le hameau d’Ayons a une chapelle dédiée à Notre-Dame, c’était jadis une annexe de la paroisse d’Entrevennes. On y fait aujourd’hui les offices publics, le jour de la Nativité de la Sainte-Vierge (8 septembre). Les cartes modernes indiquent la chapelle et un cimetière.


Synthèse

La chapelle Notre-Dame, par sa situation, son implantation, le pèlerinage qui s’y faisait et l’environnement, paraît bien relever des premières paroisses. En plein champ, isolée, sur un site antique et près d’une voie de passage, elle desservait un habitat dispersé sur le plateau.


(1) Alpes Romanes 2, p. 52. Collier, p. 100. Alpes Romanes reconnaît qu’elle ne peut pas être antérieure à la fin du XIIe siècle.

(2) Cette date n’est pas celle de l’édification de la partie ouest, mais seulement de réparations et d’installation d’une nouvelle porte, le cadastre de 1824 dessinant l’édifice tel qu’il se présente encore aujourd’hui.

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Aujourd’hui chef-lieu de canton, cette vaste commune de 6037 hectares est située aux confins sud du département. Elle est arrosée par le fleuve Var et le torrent le Coulomp qui offrent en certains endroits des rives élargies propices aux cultures. Après avoir été le siège d’une cité romaine sous le nom de Glanate, elle devient un évêché dont le premier évêque connu est Claudius en 541 sous le nom de civitas Glannatina. Cette cité et l’évêché étaient situés en aval du village actuel, sur la rive droite du Var selon les historiens et archéologues (1). C’est vers la fin du XIVe siècle que la cité antique fut abandonnée et l’habitat transféré au village actuel.

La cathédrale de la Seds et l’église Saint-Michel de la Seds

Mais un problème se pose que personne n’a soulevé jusqu’à maintenant. Il existe deux sites éloignés l’un de l’autre de près de 1500 mètres. Sur les cartes modernes, il existe le lieu-dit le Parc où subsiste l’abside de la cathédrale romane et un autre site dit Glandèves avec une croix. La carte de Cassini n° 168 est encore plus précise et riche d’enseignements : le lieu-dit le Parc est appelé l’Evêché avec une église, l’autre site est dit Glandeve avec une église en ruine. Le cadastre de 1816 fournit les mêmes indications que Cassini (Section C 1, parcelle 292 et C 2 parcelle 424). Il y a donc deux lieux de culte. Si le premier correspond à Notre-Dame de la Seds, il faudrait peut-être placer à Glandeve l’ecclesia Sancti Michaelis de Sede citée par les Pouillés en 1351 et 1376 (p. 261 et 264). La position de ce Glandèves est en retrait du cours du Var et est même protégé des crues par une colline allongée d’une soixantaine de mètres de hauteur. Entre celle-ci et le départ de la pente de la montagne au sud il existe une sorte de couloir protégé des deux côtés où passait le chemin d’Entrevaux au Puget comme l’appelle le cadastre napoléonien. C’est là qu’était situé Glandèves, à l’abri. La France Pontificale relate que l’on trouve peu de vestiges d’habitation, excepté les débris de l’ancienne église, nommée Notre-Dame de la Sedz, à côté desquels on bâtit, au XVIIe siècle, le palais de l’évêque, car les évêques avaient d’abord habité dans un prieuré de Bénédictins situé à Glandèves, puis à Beuil dans le comté de Nice, ensuite à Annot, et enfin à la Sedz même (II, p. 296). L’abbé Féraud donne les mêmes indications dans ses Souvenirs Religieux (p. 273-276). Or, le cartulaire de Saint-Victor fait état en 1337 de deux prieurés, du Saint-Sépulcre et de Saint-Michel de Minet, érigés in cathedrali ecclesia Gladatensi (II, n° 1131, p. 620). Quant à Abbayes et Prieurés, il cite un prieuré Saint-Michel, uni au chapitre cathédral (p. 173).

Plusieurs indices concordent pour placer à l’origine le siège de l’évêché à Glandèves alors que la cathédrale se trouvait au lieu-dit le Parc. C’est là, dans ce dernier lieu, que s’élevaient l’agglomération gallo-romaine ainsi que l’église primitive comme l’a démontré Guy Barruol. On sait par ailleurs que le palais épiscopal fut construit par l’évêque Jean-Dominique Ithier (1654-1672) qui fit bâtir à la Sedz une maison de campagne, ornée d’une magnifique galerie et environnée d’un superbe parc (France Pontificale II, p. 336).

167. Notre-Dame de la Seds

Il ne subsiste de l’ancienne cathédrale de Glandèves que le dernier vestige de la cathédrale romane : les parties basses de l’abside et de la travée de choeur, d’un très beau moyen appareil, à soubassement biseauté, à colonnettes engagées sur dosseret. L’église devait être vaste et belle (Collier, p. 101). Alpes Romanes conclut après une brève description : la cathédrale de Glandèves est un jalon méconnu mais important de l’architecture romane dans le Sud-Est (p.52). Ces vestiges sont situés près de l’Hôpital au lieu-dit le Parc.

168. Saint-Jean-du-Désert

C’est le lieu d’un des pèlerinages le plus important du département. C’est peut-être également l’un des plus anciens. Ecoutons H. Bouche qui en parle par deux fois :

En ce Diocèse il y a une dévotion fort célèbre, où afflue une tres-grande quantité de peuple de toutes parts, à une Chapelle aux champs sous le titre de  S. Jean des Prés, à une lieuë de l’Eglise Cathédrale. Au jour de la veille de Saint Jean Baptiste les Prêtres de cette Eglise y viennent en procession portant la chasse de S. Jean, où il y a une de ses dents : et après avoir chanté les Vespres en cette Chapelle, qui est sur une éminence, ils descendent en bas à un prez, pour y bénir une petite source d’eau, qui, en vertu de cette bénédiction, guérit de beaucoup d’infirmités, et sur tout des écroüelles. Le petit peuple fait de grands contes des merveilles de cette fontaine ; mais outre la bénédiction de l’Eglise, qui imprime à cette eau une vertu surnaturelle, il ne s’y rencontre rien qui ne soit naturel. Je m’y suis porté expressement le iour de la veille de cette Feste, l’an 1655 pour voir et considérer tout ce qui s’y fait. Mais ie n’y ay rien veu d’extraordinaire, et qui ne soit chose naturelle (I, p. 280).

Dans son chapitre consacré aux fontaines, il ajoute : une autre (fontaine) au terroir de Glandeves ou d’Entrevaux, vulgairement dite S. Jean des Prez, laquelle après la bénédiction de l’Eglise, faite sur ses eaux au iour de la veille de S. Jean Baptiste, coule durant tout l’Octave de la feste du même saint, et guérit de beaucoup de sorte d’infirmités, et particulièrement des fievres, des écrouelles  et de la gale.  De cette fontaine font encore mention le sus-allégué Gervais, qui écrivait vers l’an 1200, et Pierre Marin Evêque de Glandèves, environ l’an 1448, en son livre manuscrit de ses Prédications, conservé dans le Couvent des Augustins  de la ville d’Aix.

Il établit cependant quelques réserves en concluant : mais il est à remarquer que, sur ce que le vulgaire croit qu’il soit chose miraculeuse, au sujet de ces deux fontaines de Saint Jean et Saint Auban, de ce que n’y ayant, ou n’y apparoissant quelque fois point d’eau, avant la bénédiction de l’Eglise, et qu’après cette bénédiction on y en découvre, j’estime que ce soit chose naturelle, et qu’il ne faut pas referer cela à un miracle particulier. Car comme après la bénédiction de l’Eglise, ceux qui y sont présents n’y voyant point d’eau, qui est un peu profonde, prennent de la terre ou de la bouë, qui cachent cette eau, pour les emporter à leurs maisons pour s’en servir au besoin de leurs infirmités, l’eau qui estoit cachée dessous, commence à paroître naturellement, puisqu’elle y estoit avant cette bénédiction, et ainsi opinèrent avec moi (qui me treuvay un iour présent à cette action) quelques personnages pieux et doctes, qui y estoient présents, et qui en firent le iugement (I, p. 36).

Bouche cite deux auteurs qui, avant lui, parlent de cette eau miraculeuse, un certain Gervais en 1200 et Pierre Marin, évêque de Glandèves de 1447 à  1458. Sur le premier le mystère demeure. Pour l’autre, un des sermons de l’évêque est retrancrit en partie par Fauris de Saint-Vincens, dans un manuscrit conservé à la bibliothèque Méjanes. En voici la reproduction fournie par le PR (2)  : une fontaine située au désert du diocèse de Glandèves, près de la ville d’Entrevaux, que l’on apelle la fontaine de Saint-Jean. Il dit que la veille de Saint-Jean, cette fontaine, après avoir été bénie par les prêtres, commence à couler, et donne de l’eau pendant les huit jours  de l’octave. Il ajoute qu’on attribue à cette eau des effets miraculeux pour la guérison de plusieurs maladies. Il évoque les miracles qui attirent chaque année une grande foule de pèlerins, lesquels affluent non seulement des environs, mais aussi du Piémont et de la Ligurie, jusqu’au nombre de trois ou quatre mille pour passer la nuit dans ce pré et assister au jaillissement de l’eau miraculeuse.

La chapelle, selon R. Collier, ayant conservé par miracle beaucoup de son antique saveur, révèle une structure plus complexe, témoignant aussi, peut-être, de survivances romanes ; dans son état actuel, elle doit dater en gros du XVIIe siècle. Tout en longueur, on la dirait faite de deux chapelles juxtaposées et terminées par un chœur à chevet plat, voûté d’arêtes ; la première serait formée d’une longue travée avec un berceau brisé, la seconde de deux travées voûtées de même et séparées par un doubleau finissant sur pilastres. Peut-être y avait-il au centre une chapelle romane qu’on aurait prolongée dans les deux sens (p. 219). La chapelle semble succéder à un site antique où, selon les observations faites par Pierre Bodard, aurait existé une fabrique de tegulae (3).

Certains auteurs font remonter son origine au Ve siècle et d’autres au XIe siècle. C’est ce qu’affirme l’enquête sur les lieux de culte de 1899 : chapelle S. Jean Baptiste du désert date du 5e siècle ; elle fut par ordonnance du 27 septembre 1735 érigée en chapelle annexe de l’église paroissiale (2 V 73, n° 118). Et de poursuivre sur les autres chapelles rurales : outre la chapelle du Parc, aujourd’hui fermée, il y a la chapelle à l’hospice et huit chapelles rurales ouvertes en tout temps et de date très ancienne.

Les chapelles rurales

Ce sont des lieux de culte établis dans des hameaux pour les desservir ainsi que les fermes voisines. Pour les retrouver nous allons comparer la carte de Cassini avec la carte IGN moderne.
. Baye avec une chapelle pour Cassini ; chapelle Saint-Claude au hameau du Bay sur IGN
. Le Plan avec chapelle pour Cassini ; chapelle Sainte-Marguerite au Plan sur IGN
. Valbonnette, chapelle sur Cassini ; quartier de Valbonnette sur IGN sans chapelle
. St Jean, chapelle sur Cassini, à l’ouest d’Entrevaux ; rien sur IGN pas même le toponyme
. St Joseph, chapelle sur Cassini, au nord de la précédente ;  rien sur IGN pas même le toponyme
. Agnerq Haut, chapelle sur Cassini ; chapelle Saint-Joseph au Haut-Agner sur IGN et Saint-Louis au Bas Agnerq
. St Pierre au Brec sur Cassini ; la même chose sur IGN
. Soumare avec une chapelle sur Cassini ; Bas et Haut Sumaure sur IGN sans édifice
. Lau, avec une chapelle sur Cassini ; les Lacs avec une chapelle sur IGN
. Le Clot avec une chapelle sur Cassini ; le Claux sans chapelle sur IGN
. Glandeve Bastide avec une chapelle sur Cassini ; sans doute Villepasson sur IGN sans chapelle, où les évêques possédaient une maison de campagne.


Synthèse

Entrevaux est riche en monuments religieux. Le premier est certainement la cathédrale primitive que l’on peut dater du VIe siècle, moment où est cité le premier évêque connu du diocèse. On pense la situer à l’emplacement ou tout à côté de la cathédrale élevée au XIIe siècle, sous le titre de Notre-Dame de la Sedz. La résidence des évêques à Glandèves a permis la construction d’une église dédiée à saint Michel qui était en même temps le siège d’un prieuré de Saint-Victor. Elle apparaît au XIVe siècle. C’est ensuite la construction de la cathédrale édifiée dans le village d’Entrevaux, ouvrage commencé en 1610 (Collier, p. 184). Il reste toutes les chapelles dont celle de Saint-Jean qui est déjà sûrement citée au milieu du XVe siècle. Pour les autres, Cassini, à la fin du XVIIIe siècle, en fournit une belle nomenclature.


(1) Sur cette cité et l’évêché, voir Carte Archéologique, p. 176-179. G. BARRUOL, « Deux citées de la Province des Alpes-Maritimes, Glandève et Briançonnet », Hommage à Fernand Benoît, Institut international d’études ligures, Bordighera, 1972, T. III, p. 231-243.

(2)  Jean Dieudé et Marie-Madeleine Viré, « Sanctuaires, pèlerinages et romérages au diocèse de Digne », A.P.R.H.P., 2009, p. 86.

(3) BODARD Pierre, « Le Haut pays niçois sous l’Empire romain et le Haut Moyen Age », Mém. IPAAM, T XXI, 1979, p. 35.

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